crier


crier tu vois un père ne peut faire ça à travers le silence un père ne peut faire peur la peur peur de quoi qui tient peur de lui qui oblige au silence de se taire tu ne diras rien c’est entre nous toi et moi rien le silence mais pourquoi comme ça peur passe blessure reste et au pluriel pareil mais toi tu es là et on n’y peut rien te fâches frappes hurles mais vraiment tu as quoi au ventre comme mal ça n’existe pas des raisons pour agir ainsi pour faire ça la peur comme lui comme moi la peur je ne vois que la peur la peur c’est ça

je voulais que tu meurs

crier père mais de qui de quoi pour qui et ce mal au ventre que j’avais plus que toi ce mal qui gagnera toute ta chair tes os ce n’est pas l’usine ce n’est pas l’amiante le charbon l’alcool c’est juste le fond la fonte de soi se perdre te perdre comme on se noie soi l’autre la main sur la tête la main sur la bouche étouffer taire crever sers fort sinon on se réveillera sinon quoi tu veux nous aimer mais pas comme ça regarde mes yeux regarde-moi j’ai dix ans quarante maintenant tu es parti depuis je n’ai jamais compris
rien à faire laisser faire soi passible soi comme mort sauf quand ça hurle la pluie le vent en tête tapent frappent et toi pareil le père dis-tu mort tu ne le feras plus
c’est le noir qui sauve jamais la lumière tu te perds je m’échappe en terre fuite l’heure a sonné et tu tombes n’y pensant pas mais

on ira jamais sur ta tombe

suite de cordes grattées
voix débutent
des phrases courtes puis liées
le son emplit
la voix couvre se multiplie
les larmes viennent
le diamant saute
rayure
reprend
boucle
mourra sans comprendre
admettre juste
un tour pour rien qui croyais tant

crier j’aurais brûlé la maison et tout dedans voulais me jeter du toit falaises proches me noyer mer déchaînée finir écrasé à cause de toi d’elle aussi je voulais te détruire me détruisant t’anéantir me supprimant mais tombais sur la chute en découpais les pages à la lame prise pour entailler mon bras camus inconnu dans la bibliothèque blanche de l’étage titre qui allait bien au monde comme à moi et mon souvenir de relire trente-cinq ans après en moi ce sont toujours les autres qui meurent

ce sont toujours les autres qui meurent



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 30 juillet 2013.