
texte en cours de rédaction sur le travail récent de kacha legrand plasticienne
(l’image ci-dessus n’est que la vue au travers d’un verre cathédrale du jardin de l’artiste)
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sur la table de bois un ordinateur un téléphone des catalogues deux tasses vides
dans la pièce au mur les trophées sur soi gagnés ceux qui font avancer aller au-delà quelque chose comme un autre soi
une équerre de murs face à une équerre de lumière fenêtres sur le paysage la pente la ville que l’on devine lointaine et proche et dans l’espacement la table de bois blanchi les chaises l’artiste
la pièce est blanche celle de l’installation celle installée celle où elle est
la pièce est blanche nuée au mur fixée poussière d’étoiles voile lactée et les nuages des objets blancs géométriques profonds d’angles vifs
quelques étagères un inventaire des livres des disques un miroir au mercure revenu à la surface comme ressort de terre aux beaux jours le vert du verre miroir élevé à l’état de poussière
comment dire dit-elle
il y a quelque part dans la mémoire des lieux sous un lit dans une boîte grande comme un corps des papiers superposés mers étales grandes marées faits de rouges de soie de cristal que la lumière transperce traverse passe
il y a ce papier-mémoire venu de l’enfance avec lequel on emballait les paquets de chicorée papier rouge relief et bruit celui du froissement de la peau sous la main qui le tient et l’odeur le parfum la cuisine image floue qui file et qu’on retient
il y a à plat le rouge étalé comme un lac une étendue mille reflets il y a un puis deux puis trois puis encore ainsi et comme ça le rouge qui s’additionne le profond qui s’atteint la lumière qui fusionne le blanc à l’entour qui retient
je me souviens de notre première rencontre
je me souviens de la lumière de ce jour-là
je me souviens c’est déjà ça
la pièce est l’atelier le séjour la salle le salon sont l’atelier la maison est l’atelier la ville les livres les gens croisés sont l’atelier
sur la table de bois dix ou quinze volumes comme des livres ouverts chacun son histoire chacun sa lumière et le plateau de bois devenu surface lunaire apesanteur conquête
comment dire un pas puis déjà loin un autre des bonds des rebonds comme on respire à fond
ici travaillent par additions des volumes des pièces extrusions
on échappe au rouge au plan au reflet
on assemble ce qui est
on travaille le bois le découpe le ponce le polit
on réunit on colle on efface noie associe
on peint au blanc tout relief comme l’hiver couvre d’un geste les parkings infinis des supermarchés périphériques où l’on se perd
quelque part un bruit quelque part un bruissement quelque part une brume un effacement
le rouge sur la feuille s’éteint s’évanouit s’imprègne dans le blanc évanescent
le volume naît croît prend grandit mesurément
ils sont tant
on les pose sur la table de bois
ils s’étendent disposent prennent place nous fixent étrangement
on attrape une boîte orange et plate du haut d’une étagère la descend
un voile de poussiere de la main on efface poussière fine du blanc
recélé en-dedans un leporello papier mastic impressions de rouge et de blanc
je me souviens de l’été bord de mer esseulé pins et rochers
je me souviens des carnets aux feuilles détachées et quadrillées sur lesquelles de dessinaient mille formes évidées
je me souviens des minuscules pierres amoncelées puis sur la table sous le mimosa étalées inventaire fait
on parle espacement
on parle inscrit
en-dedans

1ère mise en ligne et dernière modification le 18 octobre 2015.