à peine perdu(e) reçoit christophe grossi
(vases communicants / juillet 2012)
et christophe grossi me reçoit chez lui

Déjà que le nom des rues et le prénom de tes proches disparaissent sans que tu en aies conscience, que les chansons que tu sifflotais au siècle dernier passent à la trappe et que des visages s’effacent (alors que tu luttais pour ne jamais abandonner, et mieux retenir, et mieux enregistrer, et plus longtemps garder) ; déjà que parfois tu n’es plus que la conséquence de ta propre négligence, que tu ne sais plus quoi chercher dans les creux, les trous, les placards et les poches de ton gilet ; déjà que ta mémoire se troue, que tu as perdu celle des origines, que l’ouvroir se perce et que se remplit le plein dans l’écart (alors que de guerre lasse ta tête a fini par geler ton corps, que ton ombre amnistie chaque jour tes empreintes et que tu te noies sous nos yeux) :

aurait-on en tête dans cette rue face aux voies ferrées
Où Usurper Bosser Lire Impressionner Eprouver
aimerait-on dans cette petite rue toute grillagée
Où Uriner Boiter Louvoyer Imaginer Ecrire
exigerait-on dans ce coude perdu de ville
Où User Boire Lanterner Imager Elire
ordonnerait-on sur ce trottoir ébloui
Où Unir Botter Lier Imiter Epier
voudrait-on te rappeler ô lubie !
ce qui t’éloigne de nos ombres
ce sur quoi tu viens achopper,
et ce qui trop nous échappe,
cherche-t-on réellement
à ce que tu le voies toi
ce mot de six lettres
ce mot-là ô bleui ?
••••••

à Madeleine
juillet 2012

la participation de christophe grossi à àpeineperdu(e) s’inscrit dans le cadre des vases communicants, initiés par françois bon
le premier vendredi de chaque mois, on écrit sur le blog d’un autre comme on le ferait pour soi
liminaire et fenêtres open space furent les premiers
merci à brigitte célérier