sur la ville (et se perdant en elle)


on avait voulu se noyer dans la ville se fondre en elle laissant nos sacs à l’hôtel marchant regard distrait comme si d’ici on était ici on vivait ne rien prendre avec surprise n’y trop d’intérêt juste passer discrètement être passants on avait voulu qui tous les trois mètres dégainait pour tout ce qu’on voyait nos instamatic dernier cri sur les riverains marée humaine sur les devantures usées de boutiques que personne d’autre ne semblait voir ni regarder sur les carrefours tachetés de jaune comme sur les murs affichés on avait voulu faire taire notre différence qui semblait tant nous imprégner de la ville qu’en elle seuls on était les autres ailleurs autre monde vraiment
et la ville ici dans ces rues marchandes où on avait rendez-vous foule d’hommes allant indifféremment droit devant elle de nous rattraper quartier centré et la main de perdre prise le corps pied la ville de s’échapper le sable de filer entre nos doigts et de se dire pour la première fois qu’aveugles ici on était

on avait voulu se noyer dans ville qui nous rejetait maintenant sur la grève corps de côté reprenant souffle avant de se relever repartir s’échapper même fuyant dans le sous-sol obscur et anonyme de la ville-tunnel on avait repris pied marchant comme on fraie chemin tranchant dans l’inerte banquise qui sinon vous retient paralyse on avait fui pour se sauver et l’air de nouveau de nous irriguer poumons gonflés heureux de reprendre vie

sur la ville on avait gagné

barcelone_février 2013



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 6 mars 2013.