une immense ombre


de la pointe des aiguilles de l’horloge du sommet de la tour de la cathédrale saint-paul on voit à ses pieds toute la cité où dès le matin s’activent les hommes enchaînés alors qu’au loin des remorqueurs remontent le fleuve à la tête de trains de péniches enchaînées devant le portail entre fleet street et la bourse c’est va-et-vient perpétuel et ludgate circus est l‘axe de londres son pivot sa rotule et toute la ville de tourner autour tout entière
juste avant le déjeuner le mouvement s’intensifie les garçons de bureau courent d’une banque à l’autre les reporters amènent aux journaux les dernières nouvelles qui paraîtrons dans l’édition du soir on remue on tourne on court on parcourt mille remous
quelques couples de gens âgés dans l’ombre du parc du chapitre prennent le frais comme d’autres la fuite devant la plaque commémorative d’edgar wallace qui connut la richesse et aussi la pauvreté qui hanta les rois et sut rester lui-même qui voua son talent aux lettres mais qui à fleet street donna son cœur du moins dit-on là où bon nombre de fortunes rapides et brillantes ont commencé
de jeunes gratte-papier qui passaient hier ici en sifflant devant le portail corinthien érigé par wren glissent aujourd’hui dans leur confortable voiture hybride et silencieuse le long de walting street observant un silence de respect seyant aux gens arrivés au bout de l’inutile course qui ne parlent plus qu’à leur téléphone portable oreillette dissimulée l’air important sur leurs traits tirés
depuis longtemps ludgate hill est d’affaires un centre la presse a succédé aux gazettes et la finance au troc primitif et entre ces deux mondes la cathédrale dressée comme un autre mensonge plus durable encore une immense ombre



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 25 novembre 2016.