le fleuve


le matin se glisse dans l’estuaire gagnant les marais grimpant sur les collines pour s’étendre enfin sur la ville alors que poussés par la brise venant du nord-est et remontant le courant caboteurs et cargos y amènent des cargaisons variées de bois de mine au sucre et vaisselles en matière plastique
le fleuve
le fleuve est la plus ancienne entrée de la ville et le voyageur arrivant par terre ne trouve sur sa route bordée de centaines de villas toutes pareilles rien qui en indique le commencement une ville sale peut-être mais une ville et ni restes d’enceinte ni boulevards ni porte ni tour pour marquer le point où les villages alentour s’effacent devant la métropole où les vagues banlieues font place à la ville mais à celui qui arrive par la mer l’impression tout autre
le fleuve
le fleuve et ses rives où les grands souvenirs se pressent évoquant les grandes nefs antiques glissant jusqu’à leur forteresse plus tard submergée comme les rames frappant l’eau clair en cadence et les écumeurs débarquant le butin enlevé à l’orient ou d’autres encore plus modestes pataugeant à marée basse pour repêcher certains débris afin de les revendre
le fleuve
le fleuve à l’aspect des rives changé le fleuve aux prés devenant usines le fleuve à la verdure entre les maisons étouffée de plus en plus le fleuve aux quais s’enchaînant en un interminable ruban de pierre
le fleuve
le fleuve a enfanté la ville et la ville est devenue le port le port de la tamise



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 20 novembre 2016.