
texte en cours de rédaction sur le travail récent de kacha legrand plasticienne
(l’image ci-dessus n’est que la vue au travers d’un verre cathédrale du jardin de l’artiste)
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comment dire
on avait installé dans un grand hall usine désaffectée murs de brique délabrés un mur blanc une lame tranchante dans l’obscurité
on avait éteint le jour allumé la nuit fait disparaître le paysage évanoui
on avait déposé treize volumes blancs et la lumière en-dedans
volta
edison
puis plus rien avant les volumes blancs
comment dire
sur ma table de travail deux photos liées verticalement en noir et blanc de plossu on dirait un mouchoir de papier imprimé larmes gardées retenues
une femme court dans la rue robe blanche peau mate un sac au bras cheveux au vent elle court fuit s’évade ou peut-être rejoint
une femme dans l’encoignure d’une porte d’immeuble tenant à la main une photographie ou bien est-ce une carte postale qui la regarde la fixe on l’imagine de rouge vêtue cheveux roux la peau blanche
il y a au mur un papier de soi blanc
un papier de larmes
froissé est le temps
il y a au mur dans un reflet de sang le miroir de soi
et la profondeur et le trouble
glacé est le temps
la main se perd à la surface ouate coton soie
la main se perd la peau se tend
le rouge gonfle prend
écoute
écoute le vent
écoute le temps
peut-être qu’il faut le lui dire peut-être qu’il faut
avant est le blanc le sang coule le rouge vient qui engendre
un autre blanc
peut-être est-ce le même je veux dire ce rouge et ce blanc
peut-être est-ce le même temps
celui du corps incessamment
le rouge le blanc
récurrence
permanence
rouge
blanc
rouge
blanc rouge blanc
rouge blanc rouge
ainsi va tant
au mur on accroche les éléments de soi des peaux mortes des prélèvements des instants des restes vestiges d’un temps
au mur on dispose dans un repos qui semble éternel nos peaux elles s’étalent se répandent comme elles nous quittent s’envolent
au mur on laisse de soi ce qui perdu un jour renaît toujours
mon corps est blanc au dehors dis-tu
mon corps est blanc dis-tu
mon corps
mon corps est rouge sang en dedans
et tu répètes encore
mon corps est rouge sang
nos yeux se troublent le monde suit
la nuit n’est que blanc le jour suie
je saigne et ce sang est ce qui nous unit
la salle est grande l’usine vide électricité coupée
volta et edison sont morts
au mur des éléments de soi dans la lumière des volumes blancs
on se perd
comment dire
on s’éprend

1ère mise en ligne et dernière modification le 11 novembre 2015.