chambre 472 fenêtre


orthopédie rachis
chambre 472 fenêtre
bâtiment DEVE 2 quatrième étage
rouen

je suis entré dans un hôpital la première fois un peu avant l’âge d’un an étant né dans une maternité privée villa bourgeoise de la rue philippe barret à flanc de coteau au havre il s’agissait alors d’éviter la mort pour un enfant né à terme et non souhaité
ma mère qui y travaillait hôpital rené coty en centre ville en avait rapporté quelques bactéries mortelles chez l’enfant sans intention de nuire je dois le concéder mais la conséquence la même sur le nouveau né qu’on plaça dans un aquarium que des mains de caoutchouc venaient frôler soigner manipuler en évitant tout contact comme certains manipulent des matières dangereuses ou modifient génétiquement celles anodines devenant lucratives
plus tard vers l’âge de cinq ans alors qu’on attendait ma mère mon père et moi assis dans la gs orange stationnée dans la cour de l’hôpital nous avions vu passer un homme blouse blanche avec un long paquet sous le bras qui rejoignait un bâtiment sans autres fenêtres que des impostes à soufflet sur l’extérieur et bas de toit il va à la morgue c’est une jambe qu’il transporte dit presque amusé mon père la gauloise à la bouche que je questionnais avant que de prendre la décision de désormais et à jamais attendre dehors c’est à dire hors de l’enceinte de l’hôpital chaque fois qu’il le faudrait ma mère après avoir vu mon visage décomposé et figé au tain jaune dans le rétroviseur central qui trônait sur le tableau de bord dans cette première génération de gs
nous nous garions alors quand on venait chercher ma mère devant une boutique de pompes funèbres dont la vitrine recelait de morceaux de pierres tombales servant d’échantillons de croix sur lesquelles reposait ou non un christ de bronze de plaques gravées aux noms imaginaires mais à quel point de défunts et de corbeilles de fleurs en céramique émaillée dont je comprenais mal l’intérêt jusqu’à dire un jour je pourrais acheter cette corbeille au couvercle ouvert et aux fleurs épanouies pour la fête des mères ça lui ferait plaisir qui aime les fleurs et les objets sans intérêts
à douze ans il y eut une visite à l’hôpital où mourant marcel mon grand-père si important pour moi voulait me voir une dernière fois m’avait-on dit pour me convaincre de m’y rendre je m’étais forcé à y aller me forçant aussi dans les couloirs à avancer puis à passer la porte et l’empreinte en moi de son visage marqué par une maladie qui le rongeait depuis longtemps déjà mais là le dévorait de l’intérieur qui ne s’effacera plus et je regrettais d’être venu avant de sortir et de le quitter me demandant si le bien fait compensait le trouble gardé longtemps en moi



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 8 mars 2017.