boutonnier / delabranche _paroles /2


nos mots se perdent tout autant que nous évaporation évanouissement qui re-tombent à terre semant le trouble re-naissants

mots que l’on croyait tenir _et la rosée perle mille lettres reflets qu’une main cueille geste tremblant et l’eau de glisser fuyant

tu vois je perds tout ce que j’approche et tomber tomber vraiment ne me fait ni re-naître ni perler mais descendre seulement

en bas je te vois crocheter la nuit percer le nu des lisières ajourer la chute niellée d’aurores noires

tu comprends je te regarde mais je suis la terre au fond rien de plus

les mots ravinent mes joues je m’éboule à l’orage et c’est hurler ce ruisseau de nuit qui fait mon corps dans ton descendre

tu vois je voudrais tenir ce que dit la fuite en moi_rien ne vient qu’instruit l’oubli le printemps et ses senteurs qui sont sang du paysage

je voudrais oui mais ce n’est pas grave rien qu’une houle idiote en son rictus arrogant tant pis je bois et puis c’est rien je vis vers l’insu

et j’écoute la pente combler d’autres lieux ce n’est ni re-naître ni perler c’est peut-être un peuple qui rêve

c’est peut-être un rivage en plaine sous les arbres et les cabanes_une enclave d’ennui

c’est peut-être ça que tu cherches_l’enseigne blanche interlignée dans ta chute

je voudrais détruire les vitrines en brume et la claudication des invendus _je voudrais un rêve je trouve ta chute qui sauve

descendre sous les pas ruiner l’allant des érigés _je voudrais les rues peuplées de failles en chair

je voudrais le néant

à la lumière de tendre la peau et l’œil de suivre

à la main de serrer comme les fers retiennent

au grès la terre au sable le verre donne ta main la mienne est pleine prends

veux-tu prendre vide en soi _mes doigts tressés dans la courbature au creux du ressac

veux-tu

je prends oui l’offrande est belle _loin dans l’écho du manque _ta main pleine de d’en fuite c’est la nuit pleurée là-bas

voudrais-tu

glisser sous la lucarne ces mots distant qui ne disent rien

veiner de noms l’acouphène au nord du silence

ta main harassant la mendicité sans rêves

et moi je te dis

nos mains dans l’intervalle valent trois fois la pluie

c’est toi

et moi je te dis

c’est toi

oui c’est un éclair rêche

diffus

c’est toi oui je suis d’accord

reprendre le gris le fer et la cendre tombés de tes mains _reprendre le fil le cours le sens que tout contient

reprendre la vie invisible la ville et ses jalousies _reprendre le masque la frange le visage que nous a enseignés le gardien

reprendre courage

retenir rattraper (de justesse) à bout de bras à bout de force faiblir peiner autant mais pour quoi et reprendre force serrer les doigts

serrer la main ferrer le poing faire taire les voix qui rongent l’espoir inondant de noir tes yeux comme perdus déjà

mais lâcher la main n’en pouvant plus pluie redoublant versant dans le vide s’enfonçant (mouvement mouvement) chute _silence nappant

reprendre la morsure au début _sous les cyprès rouge sang _sous ce silence nappant la fatigue des pluies ouvertes

mon sang est noir sur l’écran

descendre vers l’écran où torrents se ruent éreintés dans le sang des encres

j’ai tout gommé disait-il tout effacé fait le noir ouvert le néant j’ai tout gommé et voilà que tout revient maintenant

son sourd résonance qui persiste et résiste et fait taire le reste alentour

il disait que le son est un volume où loger le silence des yeux

précis et précieux

alentour j’ai vu creuser les signes dans la cicatrice de reste

et l’abîme et le temps semblables au cœur rouge sang

il disait ta bouche c’est un rift à fleur de peau _deux terres en collision _le son et l’éclat d’un sens brisé sur la langue

il disait ne dis rien écoute écoute le bruit de tes mains quand rien ne les touche quand elles ne tiennent plus rien _écoute

il disait le vent dans les mots la peur au ventre que le bruit du sang dans les veines rythment comme les montres le temps

il disait écoute maintenant

j’ai vu tes doigts lui répondre et ta peau dire l’esseulement et j’ai pris son souffle pour un arbre _ses racines retenues dans la couleur

c’était le gardien l’orme aux ailes de cendres

tu avais déposé tes os à l’estuaire _l’immense virgule faisait le ciel _il disait écoute la remontée d’une lune sous la nuque du jour écoute

il disait

écoute les hommes

il disait

écoute maintenant

écoute

et le temps de passer comme l’eau sur les rives berges nappées irriguant la terre larmes à ses yeux sel de mer réserve au creux de ta main

il disait

la pierre s’est tendue comme la peau et la cendre s’est déposée neige grise du feu le froid

tu vois le ciel est de la partie disait-il

nous avons écouté

tu as tressé le vent et l’avenir

tressé les mots

son souffle s’est ramifié dans les mots distants qui ne disaient rien

fuir c’était ouvrir désespérer il disait trahir sans cesse trahir la posture et l’engagement trahir l’écoute s’ébouler dans la pente

il disait fie-toi à moi (tu n’aurais jamais du l’écouter)

il disait écoute-moi (et tu l’as cru)

sacs de peau ressac de fièvre cassures et tessons de soi dans les bris de l’écoute tout était à faire _j’ai vu ton sourire dévasté

le meurtre

j’ai vu tes mains pleurer

la faute

et l’air s’engouffrer

le souffle dernier

j’ai vu tes larmes rire

la prime ardeur s’élever du meurtre

oublier tout reprendre

(échange "twitter" in progress entre julien boutonnier et moi-même_ publié avec son accord_ 2013)



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 23 juin 2013.