l’ennui


il parcourait la ville comme lui l’ennui regardant à peine où allait

il avait garé le break sur les auteurs de la ville parking délaissé herbes au sol quelques épaves quelques fourgons il ne s’était pas méfié puis avait gagné le centre le port la mairie et l’église par un dédale infini de ruelles de venelles de passages et d’escaliers impossibles à recenser alors dès qu’un nom apparaissait il le notait dans un carnet celui-ci était jaune et de cuir élastique confondu et dedans dessinait d’un trait unifilaire son parcours comme de la main représenter l’instant-même il s’arrêtait l’encre aussi reprenait la main glissait pour les escaliers il cassait le trait pour les venelles pointillait pour les rues tirait droit à l’église une croix et deux pour la mairie et son parvis
il avançait sans hésiter ne faisant cas ni des regards ni des voix croisés il traçait sur le papier comme de son pas assuré la ville en sa mémoire reconstruite re-présentée
il arrivait sur le port envasé on l’aurait dit creusé dans la ville dans les quais comme asséché un creux de mer qu’au loin un mur devait retenir vagues et horizon mêlés le vide l’impressionnait le vide que l’eau quelques heures plus tard envahirait le vide comme son propre reflet alors des quais il fit le tour ceinturant le bassin aux bateaux sur le flanc couché la lumière était grise le vent puissant il faillit ébloui y tomber
il trouva un café ouvert le seul sur le port qui ressemblait encore à l’idée qu’il s’en faisait comptoir en fond de salle quatre types debout accoudés le patron de dos à faire des cafés quelques tables éparses aux chaises de bois dépareillées il commandait un crème avant de s’assoir qui choisit une table sur le mur côté mer baie cadrant le port et de là ne voyait pas le vide la vase le fond de la ville son ennui



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écrit ou proposé par : Emmanuel Delabranche
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1ère mise en ligne et dernière modification le 13 juillet 2014.